Archives de catégorie : Est’ivales

– Les éditions Jas sauvages se sont senties solidaires avec la Librairie Saint-Paul de Marseille, par Jacqueline Assaël

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Une trilogie sur l’amitié, ça sert à ça, peut-être, finalement : concrétiser le propos et montrer son soutien à ceux qui en ont besoin…La librairie Saint-Paul de Marseille est actuellement en redressement judiciaire et les libraires se battent pour la conserver en vie. Les éditions Jas sauvages ont une longue histoire d’amitié avec eux, car depuis de nombreuses années, ils nous ont accueillis pour le « Printemps des poètes » ou sans raison particulière autre que la parution d’un livre et l’envie de partager la joie qu’un tel événement représente.

Il y a peu en passant devant les arcades ocres du cours d’Estienne d’Orves, je suis passée prendre des nouvelles, échanger des nouvelles. J’ai donc annoncé la parution de mon livre : « Vous, vous êtes mes amis ». L’amitié dans le Nouveau Testament, paru aux éditions Olivetan, comme dernier volet d’un triptyque composé préalablement des deux recueils parus aux éditions Jas sauvages : Frère de silence et Nouaison. Tout de suite, Françoise, la libraire, a bondi : « Mais alors, avec un tel titre, on pourrait organiser une soirée de présentation : ce serait une bonne chose pour Olivetan, cela apporterait une bouffée de vie à la librairie, et puis ce serait une manière, pour ceux qui viendront, de manifester leur soutien, leur amitié… »

 Je n’imaginais pas une telle possibilité, en plein marasme. J’ai été frappée par la générosité de cette proposition : faire malgré tout circuler les livres et la réflexion spirituelle.

Ainsi fut fait, le 19 juin dernier, de manière assez originale : l’assistance était dispersée dans tout le magasin, parmi les livres. Un décor tout à fait mythique, en quelque sorte.

La soirée a été fort perturbée par le malaise de l’un d’entre nous, qui a nécessité l’intervention des pompiers et son départ vers l’hôpital. Après une assez longue interruption, la conférence a repris. Et comme j’annonçais mon intention de l’abréger pour ne pas retenir l’assistance jusqu’à des heures trop tardives, plusieurs voix se sont élevées pour réclamer l’intégralité du propos prévu sur l’amitié, comme une manière de vivre un soutien collectif à l’issue de cet épisode bouleversant ! Très émouvant, vraiment…Le public a bien compris l’enjeu de la séance de signature qui a suivi. La pile des livres sur l’amitié vendus au profit de la librairie a rapidement disparu et je me suis sentie entourée d’une petite nuée de lecteurs me réclamant des dédicaces amicales, au point de me donner une impression de vedettariat ! Il y avait là des proches d’hier et d’aujourd’hui, des fidèles de la librairie Saint-Paul et quelques personnes qui découvraient son emplacement dans la ville.

La clientèle d’une librairie chrétienne n’est jamais assez nombreuse, car, par définition, les religions du Livre appellent à la réflexion et à la méditation. Tous les croyants sont donc concernés par la vie de leurs librairies. Toujours est-il que l’atmosphère était chaleureuse et joyeuse, ce soir-là, à la librairie Saint-Paul, comme en attestent les commentaires de Françoise sur Facebook. Les éditions Jas sauvages se sont senties solidaires…

Photographies: Librairie Saint-Paul (Facebook)

– Les éditions Jas sauvages invitées pour les 80 ans de la paroisse de Vence

par Jacqueline Assaël

Programme des festivités

Comme l’indique ce programme, la paroisse entendait situer sa manifestation sous le signe de la tradition culturelle et littéraire de l’Église luthéro-réformée.

Les éditions Jas sauvages ont pu dresser leur stand et présenter leur production pendant tout le déroulement de la fête.

Yves Ughes avait par ailleurs organisé une après-midi de lectures poétiques pendant l’après-midi du 1er juin. Rien n’avait été laissé au hasard: les poètes savent préparer minutieusement leurs actions. Un fil rouge avait été établi pour que les lectures s’enchaînent logiquement, avec des textes issus du XVIècle siècle et des poèmes actuels qui disent la foi dans l’intervention de Dieu dans l’existence humaine, d’autres qui en appellent à Dieu, d’autres qui situent le révélation de la présence de Dieu dans des lieux privilégiés.

Yves Ughes avait aussi préalablement animé un atelier de création poétique dont la production a été intégrée à ces lectures. À Vence, tout le monde est poète et a répété avec attention les lectures dont chacun était chargé. Au total, une douzaine de lecteurs enthousiastes.

Voici le « fil rouge » d’Yves Ughes, un modèle du genre:

Le lendemain était programmée la représentation de la comédie théologique Allo Bybol, interprétée par Annie Coudène et moi-même.

Là encore, nous avons eu affaire à un public de connaisseurs, attentif et rieur. Annie avait monté un décor à partir de peluches et d’une échelle pour son personnage Angélique. Pour ma part, j’avais emprunté une énorme Bible anglicane et la bibliothèque théologique d’Yves Ughes pour garnir la table de travail de Luthérine.

Les commentaires, sur le vif, du pasteur Mercurio, après la représentation ont été d’une pertinence rare: il a relevé la structure en puzzle qui constitue la pièce combinant la trajectoire des deux personnages, le caractère volontiers subtil de l’humour employé et il n’a pas esquivé les questions de fond abordées par la comédie réclamant du sens et de la tenue pour les paroles des cantiques, dans la liturgie. Lui-même a déclaré s’être régalé tout au long du spectacle, de même que le président du conseil presbytéral, Philippe Bénistant, évoquant: « la pièce de théâtre qui nous a bousculés dans les pages de la Bible »!

Mission remplie pour Angélique et Luthérine, prêtes à continuer leur tournée!

La rencontre des lecteurs autour du stand des éditions Jas sauvages a été un réel plaisir, avec les retrouvailles de personnes avides de se sustenter de poésie, pour la méditer ou pour la partager lors de visites… Une apicultrice, une protestante ardéchoise, une descendante de protestants allemands ont choisi leurs livres et nous ont raconté leur histoire du protestantisme et leur manière de le cultiver.

Longue vie à la paroisse de Vence!

Le pasteur Mercurio et Yves Raoux accueillant les invités officiels de la célébration

Photographies: Anne Sattonnet

– Les Est’ivales des Éditions Jas sauvages : en Lorraine et en Alsace

par Jacqueline Assaël

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Nancy et le Plateau lorrain : réinventer les cantiques

et maîtriser l’exégèse biblique

Après leur Festival Poïéma II, en mai, à Marseille, les éditions Jas sauvages ont été accueillies avec beaucoup de chaleur, humaine et météorologique, dans l’est de la France, à Nancy en juin, puis à Strasbourg en juillet, pour leurs Est’ivales 2023. Une bien belle saison d’expression poétique et de réflexion biblique.

À Nancy, deux événements ont eu lieu, les 18 et 19 juin, le premier lors de la journée de fête de la paroisse de Nancy et du Plateau lorrain, autour de l’idée de la réécriture de cantiques. À la suite de Luthérine, le personnage de la comédie théologique Allo Bybol, et très sérieusement, les participants à cette après-midi festive s’étaient mis en tête de réactualiser les textes de certains cantiques pour mieux se les approprier. Dans cette idée, je leur ai présenté le contenu d’un article d’Olivier Millet expliquant la différence structurelle et spirituelle des cantiques protestants et catholiques. Pour lui, un cantiques protestant s’exprime à la première personne, singulière ou collective, dans une adresse directe à Dieu. De plus, un cantique protestant reprend des images des thèmes, des épisodes bibliques et il se sert des éléments de cette culture pour accompagner le croyant, en assemblée, vers toujours plus de conscience de la foi, avec une construction très dynamique. Les chants ne jouent pas le rôle de musique d’ambiance ou de ritournelle, ils forment et soutiennent une pensée de la foi.

Bien conscients de ces principes, trois groupes distincts ont ensuite cherché à les mettre en pratique, en réécrivant notamment, une fois encore, comme Luthérine, les paroles de Aube nouvelle, ou en inventant de nouvelles strophes pour le chant hérité d’Ésaïe : Quand les montagnes s’éloigneraient…, ou en cherchant avec humilité à établir la gradation de plusieurs strophes avant d’aboutir aux paroles actuelles du chant Jésus, je te donne tout, que certaines personnes, pour se sentir très honnêtes, avaient du mal à prononcer d’emblée.

En fait, nous avons ainsi chanté des cantiques pendant tout l’après-midi, y compris pendant la projection des propos d’Olivier Millet et le résultat a été la production très réussie d’une petite moisson de chants pleins de souffle que tous ont interprétés avec enthousiasme.

Le soir du lundi 19 juin, une conférence a ensuite eu lieu à l’espace culturel Saint-Jean. Il m’avait été demandé de traiter du sujet suivant : « Comprends-tu ce que tu lis ? », en référence à la phrase adressée par Philippe à l’eunuque phrygien (Actes, 8, 30-31), embarrassé dans sa lecture de la Bible. Avec projection de documents à l’appui, j’ai cherché à montrer d’où pouvaient venir certaines difficultés d’interprétation d’un texte biblique et quels étaient les moyens à la disposition des chercheurs en matière littéraire pour en venir à bout. Il faut tout d’abord établir le texte qui paraît le plus conforme à l’esprit de la démonstration entreprise par les auteurs, à partir de manuscrits parfois abimés, parfois divergents dans le détail. Puis il faut discerner les interprétations qui rendent honnêtement compte de la pensée des auteurs et celles qui cherchent à imposer des commentaires exégétiques visiblement partisans, et à les surimprimer par rapport au message du texte. Il est important aussi, de bien discerner la valeur spirituelle de ce type de textes, et de distinguer vie et sommeil de l’esprit ou existence et mort biologiques. Sans cela les traductions aboutissent à des contre-sens.

L’auditoire a fini par s’interroger sur la valeur comparée des diverses traductions bibliques disponibles, mais je ne peux que conseiller de mener une réflexion personnelle en tenant compte de la logique du contexte, de consulter de bonnes éditions commentées et de faire des études bibliques régulières, en paroisse, pour s’habituer à identifier les difficultés à résoudre, être en alerte et assimiler pleinement le sens profond des textes destinés à guider la vie des croyants.

Rendez-vous est pris pour l’année prochaine, ce qui donnera sans doute lieu à un prolongement de cette réflexion en commun qui nous enrichit tous, par les propositions des uns et les réactions des autres, le chant et la méditation des textes.

L’Alsace : semer la poésie de la foi à tous les vents

Nos Est’ivales à Strasbourg ont été magistralement prises en main par Lucie Wateau qui a organisé la plupart des événements qui se sont déroulés. Tout un petit calendrier de rencontres a ainsi pu se construire : une après-midi poétique chez les diaconesses de Strasbourg, le 6 juillet ; un « impromptu poétique » proposé tout d’abord à un cercle privé, mais finalement offert à tout visiteur de l’abbatiale de Rosheim, l’après-midi du 8 juillet, et une soirée à Strasbourg, grâce à l’accueil du pasteur Rudi Popp qui a intégré notre manifestation parmi les festivités de l’été organisées au Temple Neuf. Trois publics différents, donc, qui nous ont fait don de toute leur attention pour les diverses présentations que nous avons faites des recueils publiés aux éditions Jas sauvages.

Il a été très émouvant d’entendre des diaconesses, à l’issue des lectures, s’étonner de découvrir ces textes originaux, exprimant la foi de manière si personnelle, et les accueillir si favorablement, comme une gourmandise spirituelle.

Jacqueline Assaël et Lucie Wateau chez les diaconesses

Dans l’abbatiale de Rosheim, Lucie Wateau avait réuni un certain nombre de ses amis, tous amateurs d’art, sensibles à la poésie, connaisseurs et « fans » de la générosité de ses performances poétiques, en mouvement, dans l’élan de son visage qui s’illumine. Pour la circonstance, elle avait sélectionné certains de ses textes, certains de Michel Block, de Jean Alexandre ou des miens, pour faire écho à la visite guidée de l’abbatiale qu’elle venait de nous offrir. Elle a ainsi fait découvrir les textes des uns et des autres en les reliant aux thématiques du silence, du regard, du refuge, du souffle, etc. à travers une lecture sensible et très personnelle. Le public était captivé.

Lucie Wateau ci-dessus et Jacqueline Assaël ci-dessous dans l’abbatiale de Rosheim
Un tout petit auditeur de poésie, très attentif

La poésie s’est alors inscrite dans un ensemble artistique très riche, car nos lectures se sont déroulées face aux tableaux exposés d’Éliane Karakaya, sur le thème de la lutte de Jacob avec l’ange, et elles ont été suivies par les répétitions, puis le concert d’un chœur d’hommes, « Pluricanto », interprétant cantiques et musiques sacrées. Ce fut vraiment une grâce de se sentir enchâssées dans ce réseau d’art et d’amitié. La poésie s’est ainsi répandue, au pied des collines de Rosheim, escaladées par les vignobles alsaciens.

Lucie Wateau

Le réseau d’amis s’est aussi déplacé de nouveau à Strasbourg, l’après-midi du dimanche 9 juillet, élargi à des personnes informées du programme culturel de la paroisse du Temple Neuf et de notre accueil parmi ses rendez-vous de l’été. L’éventail des textes était, là, plus resserré, de manière à pouvoir entrer plus en profondeur dans l’univers de chaque poète. Nous nous sommes donc concentrées sur le recueil en préparation de Lucie Wateau, Engranger le fertile, sur le recueil de Michel Block, Périchorèse et sur le mien, Frère de silence. Le pianiste Rémi Zeller nous a accompagnées avec des improvisations très justes, reprenant la douceur de certains textes, exprimant le poids lancinant du silence ou l’allégresse causée par la perception des réponses de Dieu. Son final éblouissant a transporté le public d’enthousiasme.

Rémi Zeller, très attentif, méditant son improvisation

Puis un dialogue s’est engagé, révélant l’intérêt éprouvé par les personnes présentes et la nécessité d’un partage sur ces questions de la foi. Une jeune dame a demandé timidement à Lucie Wateau comment elle imaginait Dieu et ensuite nous avons assez longuement parlé ensemble ; l’artiste plasticien, Makis Yalenos, a signalé une convergence entre sa recherche sur la traversée de la douleur et l’œuvre de Lucie, et il a souligné l’importance de tels moments d’expression poétique. Plusieurs personnes dans le public ont mis en relief certains aspects complémentaires du court texte de Michel Block : 

Michel Block

L’une d’entre elles y a particulièrement entendu le désenchantement de Michel Block par rapport à l’humain, avec cette expression finale donnant une vision très sombre de « ce monde de nuit entière », tandis qu’une autre a retenu l’image de ce souffle parcourant l’espace. Ce fut une occasion d’évoquer cette articulation de la pensée chrétienne, dans laquelle la grâce de Dieu répare les faiblesses humaines.

Un public d’une quinzaine de personnes, puis d’une vingtaine au Temple Neuf, à la fois suffisamment limité pour que puissent s’instaurer des échanges dans une intimité chaleureuse et en même temps assez étoffé pour que les poètes et le pianiste se sentent portés par une écoute multiple, s’est donc réuni dans une atmosphère de grande sympathie, ainsi que d’appétence des mots et des silences, appelant de ses vœux des prolongements à donner à ces Est’ivales !