Ce texte est reproduit à partir du site poestrafestival.com, avec l’aimable autorisation de Julien N. Petit
Me voilà oiseau-lecteur guidé par la voix brute et légère du Haïku qui me parvient comme un jet de caillou. Les Haïkus d’Etienne Pfender invitent à un vol au-dessus de la Bible, qui ne peut être qu’un vol au-dedans, à l’image de la caverne de chair qui sauve et enferme Jonas pendant 3 jours.
L’impair prime dans l’alliance de ces vers, suscitant par leurs mots pensées et émotions suspendues, saisies et aussitôt coupées dans leur élan, dans une retenue pleine de grâce. Sans oublier la surprise, caractéristique de l’écriture du Haïku, comme de la grâce :
« Hiver ou printemps
dans ses entrailles puantes
zut comment savoir »
*
« hissant une lame
au reflet du soleil d’été
près de là un bouc »
Double surprise ici, dans toute la force poétique : celle du vers rejoignant la forme sombre de l’animal qui détourne nos yeux du couteau qu’Abraham tient au-dessus de son fils, et qui n’ira pas plus bas, car l’Eternel a pourvu.
On n’entre pas dans un Haïku, écrit Etienne Pfender, « en passant sous un arc de triomphe, mais en se laissant cueillir par la simplicité sincère de ce qui donne à lire ».
« six soirs et matins
l’Eden comme un rocking-chair
au septième jour »
Par gros temps de précarité, il existe mille raisons de se glisser dans la grâce du Haïku, comme de se tenir dans l’équilibre fragile du rocking-chair.